Quitter Paris, trinquer pour "fêter la vie" ou se cloîtrer chez soi. Comment les victimes des attentats du 13 novembre 2015 vivent-elles, depuis quatre ans, cette date-anniversaire ? Témoignage de survivants.

Partis à la frontière allemande la veille du premier anniversaire de l'attentat qui a fait 130 morts à Paris et Saint-Denis, Olivier et sa compagne ont voulu s'éloigner le plus loin possible de la capitale.

Mais tard le soir, à peine arrivés, ils ont décidé de reprendre la route. 

"En voyant les images du concert de Sting au Bataclan le 12 au soir, on s'est dit mais qu'est-ce qu'on fait là ?, on ne sentait pas à notre place", se souvient Olivier, 37 ans, documentaliste dans un média, blessé au  Bataclan. Alors, ils ont conduit toute la nuit "pour être à temps pour les commémorations" : "cela nous a fait du bien d'être à la mairie du XIe arrondissement, c'était cathartique". 

Depuis, il n'a jamais raté une cérémonie. "Un moment dont il a besoin pour faire le point et pour s'apaiser", explique celui qui est aujourd'hui vice-président de l'association Life for Paris. Désormais, "la question ne se pose plus, j'ai besoin d'être avec les victimes pour cette journée particulière". Selon lui, quatre ans après, "les personnes ont encore besoin de ces commémorations", surtout que "la communauté a besoin d'être encore soudée avant le début du procès, on ne va pas les abandonner maintenant". 

• Un tatouage évoquant le Bataclan 

Pour Sandrine, 46 ans, c'est l'inverse : "le jour J, c'est que du stress". L'année dernière, elle s'est organisée pour ne pas être à Paris. En 2018, elle a choisi d'assister à un concert de Nick Cave à Genève avec trois amis, présents aussi le soir de l'attentat : "le plus beau concert de ma vie, c'était un moment très fort et symbolique. J'ai fait revivre les morts le temps de quelques chansons", raconte cette femme, encore très marquée par l'attaque du Bataclan, qui a tué 90 personnes.

Pour le premier anniversaire, elle s'est rendue aux cérémonies officielles, derrière de "grandes lunettes noires". Une mauvaise idée, selon elle. "Je ressentais beaucoup de colère, car je n'arrivais pas à me sentir victime", raconte-t-elle. Alors, l'année suivante, la photographe, blessée au pied par une balle au Bataclan, et piétinée par la foule, est "carrément restée enfermée" chez elle "toute la journée". Cette année, elle a "un peu avancé". Ce mercredi 13 novembre, elle va aller se faire tatouer un dessin "en lien avec le Bataclan", précise Sandrine, toujours en arrêt maladie.

• "Le reste de l'année, on ne parle quasiment plus du 13 novembre"

De son côté, Camille trouve cette journée "positive". D'ailleurs, elle ne travaille jamais "pour faire des choses qui lui plaisent". Et surtout, en fin de journée, cette trentenaire "trinque" pour "fêter la vie", toujours avec le même ami, avec qui elle était le soir de l'attentat au Bataclan : "ce moment est hyper fort pour nous, c'est la meilleure manière de passer cette soirée-là", affirme-t-elle. "Boire un verre, c'est tout un symbole".

Resté coincé pendant 1h30 au Bataclan avec une amie, Stéphane, âgé de 44 ans, préfère se rendre à la mairie du XIe arrondissement depuis 2017, "la commémoration officielle au Bataclan, c'est too much, je préfère ce côté intimiste, c'est plus rassurant". Dès octobre, il compte les jours : "j'attends que ça arrive et je suis hyper soulagé quand c'est passé", explique le communiquant, "même si je suis content quand j'y suis, ça me fait du bien". Pour lui, ce moment est "vraiment important car le reste de l'année, on ne parle quasiment plus du 13 novembre".