Fourcade ou Lavillenie ? Une commission spéciale du sport français, réunie à la hâte, doit départager mercredi le biathlète et le perchiste, tous deux intéressés par une candidature au Comité international olympique (CIO). Mais la procédure est vivement critiquée.

"On nous demande de choisir entre deux champions olympiques qui ont toute légitimité pour entrer au CIO. L'un ou l'autre sera lésé. C'est un procédé inacceptable", "ça ne va pas améliorer l'image du mouvement sportif français", attaque sans ménagement l'ancien ministre de la Jeunesse et des Sports Guy Drut (1995-1997), qui cible sans le nommer le président du comité olympique français (CNOSF) Denis Masseglia.

En tant que membre du CIO, le médaillé d'or de Montréal en 1976 fait partie des quinze personnes chargées de désigner celui qui tentera de prendre la succession de Tony Estanguet. Désormais patron du comité d'organisation des JO de Paris 2024, le triple champion olympique de canoë devra laisser la place après 8 ans à la commission des athlètes de l'instance olympique, lors des JO de Tokyo à l'été 2020.

Pour la France, l'enjeu est de garder ce poste, qui donne droit à un siège parmi les 105 que compte actuellement le CIO.

D'ici là, il faut trancher entre deux scénarios : soit donner le feu vert au détenteur du record du monde du saut à la perche pour tenter sa chance dès Tokyo, ou lui demander de faire l'impasse pour pousser le quintuple champion olympique de biathlon. Car deux sportifs d'un même pays ne peuvent siéger à la commission des athlètes. Pour compliquer la donne, s'il était choisi, Fourcade devrait attendre les JO de Pékin 2022 pour se présenter, la règle voulant que les sportifs d'été soient élus aux JO d'été et ceux d'hiver aux JO d'hiver. A chaque édition, le scrutin a lieu auprès des participants aux Jeux.

"Mascarade"

"La France peut-elle se permettre de passer son tour en 2020, alors que nous avons un candidat de qualité (Renaud Lavillenie), soutenu par Sebastian Coe ? ", le président de la fédération internationale d'athlétisme (IAAF), demande André Giraud, le patron de la fédé française d'athlétisme, membre du jury. "Quelle garantie on a que Martin sera élu en 2022 ? Et dans ce cas, pourquoi ne pas attendre 2024 et voir si (Teddy) Riner ou (Tony) Parker ne sont pas intéressés", demande un autre membre du jury, sous couvert d'anonymat.

Denis Masseglia concentre les critiques pour avoir mal préparé l'échéance et laissé les deux candidatures prospérer, tout en roulant pour Fourcade, déjà à la tête de la commission des athlètes de Paris-2024. Une thèse qu'il réfute.

"Je ne peux empêcher personne d'être candidat. Et j'ai appris mi-juillet que la date fatidique du CIO pour déposer une candidature était le 9 septembre", répond Masseglia à l'AFP. "A partir de là, il fallait bien organiser une procédure. Celle que j'ai proposée suit les recommandations du CIO et j'ai eu l'assentiment des deux candidats", poursuit le président du CNOSF.

Qui composera la commission ad hoc ? Denis Masseglia et son secrétaire général, Jean-Michel Brun, les trois membres français du CIO (Estanguet, Drut et le président de la fédération internationale d'aviron Jean-Christophe Rolland), quatre présidents de fédérations sportives et six représentants des sportifs. "Une mascarade", dénonce encore Guy Drut, pour qui le vote est biaisé en faveur de Fourcade. Réponse, en principe, mercredi en fin d'après-midi, après un débat qui risque d'être animé.