Hadi Matar, jeune Américain d'origine libanaise qui a agressé l'écrivain britannique Salman Rushdie le 12 août, a été présenté à un juge de l'Etat de New York devant lequel il a plaidé "non coupable" de "tentative de meurtre" de l'écrivain. Ce dernier est toujours hospitalisé dans un état grave mais a pu dire quelques mots le 13 août au soir. Le suspect, résidant dans le New Jersey, comparaîtra une nouvelle fois le 19 août.

Les procureurs ont estimé que l'attaque de vendredi dans un centre culturel de Chautauqua, où Salman Rushdie allait donner une conférence, était préméditée. A 75 ans, l'intellectuel a été poignardé au moins à dix reprises au cou et à l'abdomen. "Salman va probablement perdre un œil, les nerfs de son bras ont été sectionnés et il a été poignardé au foie", a confié au New York Times Andrew Wylie, son agent. Il a aussi confié que Salman Rushdie a recommencé à parler le 13 août au soir, sans dire s'il restait ou pas sous assistance respiratoire.

L'attentat a provoqué une onde de choc, surtout dans les pays occidentaux. Le président américain Joe Biden a condamné "une attaque brutale" et rendu hommage à Salman Rushdie pour son "refus d'être intimidé et réduit au silence".  Vivant à New York depuis 20 ans, Salman Rushdie avait repris une vie peu ou prou normale tout en continuant de défendre, dans ses livres, la satire et l'irrévérence.

"Rien ne justifie une fatwa"

"Son combat est le nôtre, universel", avait lancé le 12 août le président français Emmanuel Macron. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres ,s'était déclaré lui "horrifié". Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a dénoncé, le 12 août, une "attaque lâche", et un "affront à la liberté d'expression". "Rien ne justifie une fatwa, une condamnation à mort", s'est indigné Charlie Hebdo, journal satirique français décimé par un attentat en janvier 2015.

En Iran, le quotidien ultraconservateur Kayhana félicité l'assaillant : "Bravo à cet homme courageux et conscient de son devoir qui a attaqué l'apostat et le vicieux Salman Rushdie", a écrit le journal. "Baisons la main de celui qui a déchiré le cou de l'ennemi de Dieu avec un couteau". Au Pakistan voisin, le parti Tehreek-e-Labbaik Pakistan, réputé pour sa violence contre ce qu'il appelle du blasphème antimusulman, a jugé aussi que Rushdie "méritait d'être tué". 

Né en 1947 en Inde dans une famille d'intellectuels musulmans non pratiquants, Salman Rushdie avait embrasé une partie du monde islamique avec la publication des "Versets sataniques", conduisant l'ayatollah iranien Rouhollah Khomeiny à émettre la "fatwa" réclamant son assassinat.

Le philosophe français Bernard-Henri Lévy plaide pour que l'écrivain obtienne le prix Nobel de littérature. "Je n'imagine pas un autre écrivain avoir l'outrecuidance, aujourd'hui, de le mériter plus que lui. La campagne commence maintenant", a-t-il écrit dans le Journal du dimanche (JDD).