"C'est du bis repetita", regrette Patrick Baudoin, coprésident du Rugby Club Romans-Péage (RCRP) qui a organisé les deux cérémonies. "Des ballons, des banderoles, des T-shirts. La marche, c'est exactement pareil, sauf que ce n'est pas la même personne. C'est ça qui est fou."
"Un jeune de 16 ans et un jeune de 22 ans. Un coup de couteau, un coup de fusil", résume-t-il, "abasourdi, assommé" que son club ait à vivre de tels drames en l'espace d'une seule année.
Le cortège, près de 2.500 personnes selon la police et constitué de nombreux jeunes, avance dans un silence quasi absolu jusqu'au stade qui abrite les matches du RCPR.
À sa tête, la mine grave, la famille de Nicolas Dumas tient dans ses mains une large banderole avec des photographies et quelques un de ses surnoms, comme "La Princesse" ou "Mon Nain".
Derrière, certains marchent une rose blanche à la main, d'autres vêtus de maillots de rugby blancs barrés de bleu, les couleurs de son club, ou de T-shirts avec la mention "Nico à jamais dans nos coeurs".
La maire LR de Romans-sur-Isère, Marie-Hélène Thoraval, est aussi présente dans la foule, mais l'heure n'est pas aux discours politiques. "C'est vraiment le recueillement" qui prime, souligne Patrick Baudoin.
"Esprit rugby"
Nicolas Dumas est décédé samedi après avoir reçu une balle dans la tête la veille devant la discothèque Le Seven à Saint-Péray (Ardèche), où deux autres personnes, présentes dans la file d'attente en ce soir d'Halloween, ont également été blessées.
Deux hommes d'une vingtaine d'années ont été arrêtés lundi soir: l'homme suspecté d'être le tireur des coups de feu a été interpellé dans les quartiers nord de Marseille, et son chauffeur présumé à Cavaillon, dans le Vaucluse.
Le 19 novembre 2023, Thomas, 16 ans, avait lui succombé après avoir reçu un coup de couteau à la sortie d'un bal dans le village de Crépol, situé à une trentaine de kilomètres de Saint-Péray.
Quatorze personnes ont depuis été mises en examen mais l'enquête n'a pas encore totalement éclairci les circonstances du drame, dont la droite et l'extrême droite s'étaient emparées pour dénoncer l'insécurité dans les zones rurales.
C'étaient des jeunes "sans histoire" qui n'étaient simplement "pas au bon endroit", résume Rémi Leite d'un club voisin où Nicolas a également joué. "C'est d'autant plus peinant", explique-t-il à l'AFP. Il se souvient d'un Nicolas "aimé de tous", "un très bon gars avec un vrai esprit rugby".
"Le rugby c'est solidaire, c'est familial. Dès qu'il y a un problème, on est tous ensemble", ajoute Patrick Valle, 68 ans, ancien joueur et dirigeant du RC Châtillon, un autre club drômois.
"Acceptation"
Mercredi, comme il y a un an lorsque 6.000 personnes avaient défilé en mémoire de Thomas, des ballons aux couleurs du RCRP, blancs et bleus ciel, se sont envolés au dessus du stade Donnadieu.
Des joueurs, main dans la main au milieu de la pelouse, ont lancé leur cri de ralliement "1,2,3 Nicolas" avant de se recueillir, et de quitter le terrain, très émus, sous les applaudissements.
Sur les 65 licenciés du club, 55 ont moins de 23 ans, souligne Patrick Baudoin. "Je ne sais pas comment ils vont se reconstruire", dit-il, précisant qu'une cellule psychologique a déjà été ouverte pour ceux qui étaient présents à la boîte de nuit le soir de la fusillade, une "bonne quinzaine".
La marche blanche est la première étape du "travail d'acceptation", selon Tristan Tardy, l'autre codirigeant du RCRP. "L'essentiel, pour nous, c'était, comme l'année dernière, de faire quelque chose de fort et qui rende un bel hommage..."