"J'ai besoin de vous écouter, de vous entendre", affirme M. Wauquiez les pieds dans la boue, invitant la vingtaine d'agriculteurs réunis en arc de cercle devant lui à lui faire part de leurs doléances à Montigné-les-Rairies (Maine-et-Loire).
Il balaie immédiatement le doute qui plane dès la première question posée par un représentant de la FDSEA, qui préfère rester anonyme et qui s'interroge sur la présence d'un possible candidat à l'Elysée au cœur de l'Anjou, loin d'Auvergne-Rhône-Alpes, la région que M. Wauquiez préside.
"L'objectif (...) est d'organiser le travail de notre famille politique pour pouvoir faire un travail d'amendement" lors du dépôt attendu d'un projet de loi gouvernemental sur l'agriculture, se justifie-t-il aux côtés du sénateur de Haute-Loire, Laurent Duplomb, et de la députée locale, Anne-Laure Blin.
La visite de la ferme d'Anthony Barillé, un producteur de lait de 39 ans qui dispose de 130 vaches, est la 17e et dernière étape d'un tour de France initié pendant la récente crise agricole et qui l'a conduit loin des frontières de sa région, notamment en Moselle, dans le Vaucluse, dans l'Eure ou encore en Haute-Marne.
A chaque fois, la visite de la ferme s'est conclue par un long échange avec un groupe d'agriculteurs comme en Anjou, où M. Wauquiez est resté pendant près de trois heures à dialoguer avec eux, cherchant à différencier sa venue des habituelles visites de ferme menées au pas de charge par les politiques.
"Nous sommes harcelés"
"Il aime bien montrer qu'il s'y connaît", se moque l'un des agriculteurs pendant la visite où l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy énumère différentes races bovines et les acronymes qui renvoient aux normes que les agriculteurs disent subir.
"Nous sommes harcelés", s'emporte un éleveur bovin, qui insiste pour ne pas être cité, de crainte de subir "un contrôle en retour".
M. Wauquiez s'emporte contre la surveillance par "satellite des exploitations", contre les "agents armés" de l'Office français de la biodiversité (OFB) "qu'il faut supprimer" et secoue la tête de gauche à droite en apprenant d'un agriculteur qu'il a été sanctionné pour "avoir déplacé la branche d'un frêne tombé au sol".
Il s'apitoie sur le sort d'Anthony Barillé qui lui a confié "avoir la chance de compter sur le salaire d'infirmière de sa femme", un revenu qui lui permet de tenir bon malgré les prix du lait actuellement.
"Fureur administrative", importations qui ne respectent pas les normes, volaille ukrainienne et cerises turques: les sujets sont abordés les uns après les autres par les agriculteurs, un électorat autrefois fidèle à la droite, mais où le RN a creusé depuis son sillon.
De quoi convaincre M. Wauquiez de faire une exception à la discrétion qu'il s'impose sur les sujets nationaux, parfois au désespoir de ses propres troupes qui attendaient qu'il intervienne lors de la réforme des retraites pour serrer les rangs de LR il y a un an.
Pour la première fois, il s'exprime publiquement sur les Européennes du 9 juin prochain: "Mon souhait, c'est que l'on ait en bonne position des agriculteurs sur la liste des Républicains", affirme-t-il, en y voyant "un signal très fort de notre volonté de (les) défendre".
Il n'a toutefois pas voulu confirmer le nom de Céline Imart, céréalière du Tarn, que Le Parisien a évoqué comme colistière de François-Xavier Bellamy, estimant qu'il revenait au patron du parti, Eric Ciotti, d'établir la liste.
Mais il s'en prend à ses rivaux directs, en dénonçant la "trahison" du secteur agricole par la majorité et en fustigeant "l'absentéisme" au parlement européen du RN Jordan Bardella.