"Nous sommes surfeurs". Les meilleurs français de Stand Up Paddle (SUP) revendiquent "la culture surf" alors que les instances internationales du canoë-kayak veulent gouverner cette discipline devenue tendance et candidate aux JO de Paris 2024.

Le SUP, classique ou race (course), est-ce du surf ou un sport de pagaie ? Pour les +supeurs+, les pratiquants du SUP, dont les championnats de France se sont achevés dimanche à Lacanau, la question ne se pose pas.

Selon eux, l'inventeur se nomme Laird Hamilton, la légende hawaïenne, surfeur de grosses vagues. Pour les kayakistes en revanche, le SUP, est plus prosaïquement un dérivé de la pirogue à pagaie.

Le Tribunal arbitral du sport (TAS) devrait décider prochainement. En jeu, l'image que la Fédération internationale de canoë-kayak veut s'accoler avec cette discipline tout terrain: littoral, fleuves, rivières...

"Le canoë-kayak veut s’approprier une image, celle d'un sport jeune", déplore le président de la Fédération de surf (FFS) Jean-Luc Arassus, reconnaissant aussi "un intérêt olympique", avec en filigrane les JO de Paris.

"Longtemps, on a pensé que le SUP, plus simple à organiser, deviendrait olympique avant le surf", rappelle Francis Distinguin, ex-président de la Fédération européenne de surf. Mais c'est le surf qui sera à Tokyo en 2020 et à Los Angeles en 2028.

Depuis quelques années, le SUP connait "un énorme engouement, à défaut de ramener des licenciés", constate Serge Lougarot, conseiller technique national du SUP à la FFS. Il y a une quarantaine de clubs dédiés, quelques pros (10 étapes à travers le monde). Mais, il n'existe "aucun chiffre précis de +supeurs+ car ils sont aussi surfeurs".

Le constat est là: le SUP est présent partout, même sur la Seine à Paris. Les activités de SUP sont ainsi devenus de véritables arguments touristiques. Comme le surf sur lequel les villes se bagarrent pour les Jeux de Paris (Lacanau contre Hossegor-Capbreton-Seignosse-Biarritz).

"Le SUP fait partie de notre patrimoine", reprend M. Arassus, soulignant que la FFS (18.000 licences fédérales et 60.000 licences loisirs) a beaucoup investi dans le SUP qui étend son territoire.

Âme perdue 

Pour elle, il s'agit de ne pas se faire dépouiller une troisième fois. En 1986, le windsurf, une de ses émanations, était passée à la voile. En 1990, le skate, qu'elle gérait, avait été marié au roller.

"Le windsurf a perdu son âme, changé d'esprit et même de nom. C'est devenu la planche à voile", se remémore M. Distinguin, premier DTN du surf, actuellement responsable du haut-niveau à Font-Romeu.

Avant de partir aux Mondiaux en Chine (23 novembre-2 décembre), pris dans cette guerre picrocholine, les membres de l'équipe de France de SUP Race ne cachent pas leur préférence. Tituan Puyot (N.3 mondial), Martin Vitry (champion d'Europe) ou Mélanie Lafenêtre veulent rester "surf".

A leurs yeux, la FFS leur offre les "meilleures conditions" en terme de staff médical, de soutien... Ils s'inquiètent également d'un canoë-kayak qui a déjà bien d'autres disciplines olympiques à soutenir...

"Je pratique la Va'a (pirogue polynésienne) qui dépend du canoë-kayak et il ne fait pas grand chose", constate Puyot. "On ne sait pas ce qu'il peut nous offrir", renchérit Vitry, professionnel de SUP.

Enfin, il y a l'esprit. Tous le revendiquent. "Je suis surf", résume Mélanie Lafenêtre. "Le SUP, c'est l'univers des surfers hawaïens", confirme M. Arassus. "Les +supeurs+ sont attachés à l'esprit de liberté", renchérit Michel Plateau, l'actuel DTN.

Finalement, la seule opposition entre +supeurs+ et les instances du surf pourrait tourner autour du 200 m en ligne, créé pour faciliter l'entrée aux JO.

Pour plusieurs +supeurs+, la similitude avec une course de canoë-kayak mais "en moins rapide" est une hérésie. "On s'est tiré une balle dans le pied", craint Puyot.

Pour Vitry, il eut été préférable de promouvoir la +beach race+ (course avec des passages de surf et sur le rivage) "plus visuel et spectaculaire". "Les gens veulent du spectacle, des émotions", insiste Puyot.