Au lendemain du deuxième tour des élections municipales, Emmanuel Macron a reçu lundi 29 juin à l'Élysée les 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). Une rencontre prévue de longue date qui intervient quelques heures après le choc provoqué par les victoires des écologistes dans plusieurs grandes villes comme Lyon, Bordeaux, Strasbourg et Marseille.

Après un entretien avec le Premier ministre Édouard Philippe, réélu maire du Havre, le chef de l'État s'est exprimé un peu avant midi devant ces 150 citoyens, qui ont rendu la semaine dernière 149 propositions au terme de neuf mois de travaux.

"Le temps d'une grossesse", a commenté le président. "Vous avez répondu avec profondeur et intelligence", a-t-il estimé, en insistant : "L'urgence est là". "Vous avez démontré que nous devons aller plus loin, plus fort. Le défi climatique nous impose de faire plus", a-t-il martelé. 

Emmanuel Macron a ensuite annoncé qu'il comptait transmettre au gouvernement ou au Parlement, ou encore soumettre à référendum "la totalité des propositions" de la Convention citoyenne pour le climat, "à l'exception de trois d'entre elles". Certaines seront décidées dès la fin juillet, d'autres intégrées au plan de relance mais la plupart feront l'objet d'un "projet de loi spécifique" multi-mesures en septembre, a-t-il précisé. 

Et "l'État prendra toute sa part : 15 milliards d'euros supplémentaires sur deux ans seront injectés pour la conversion écologique de notre économie", a déclaré le président de la République, promettant la mise en place d'un "fonds de transformation écologique de notre économie dans le plan de relance" pour notamment "investir dans les transports propres, rénover nos bâtiments" et "inventer les industries de demain".

Trois propositions rejetées

Parmi les propositions rejetées par le chef de l'État, la taxe de 4% sur les dividendes qui risquerait selon lui de "décourager l'investissement". "Mettre sur tous les investissements une taxe, c'est réduire notre chance d'attirer des investissements supplémentaires. Je crois à la croissance de notre économie", a-t-il étayé. Accroître la fiscalité pour répondre à ce défi n'est pas la bonne manière. Mais réfléchir à une fiscalité plus incitative vers ce qui est plus vert, j'y suis prêt", a-t-il précisé. 

Emmanuel Macron a également décidé de "reporter le débat" à l'abaissement de la limitation de vitesse de 130 à 110 km/h sur autoroute, qui agitait déjà la population et l'opposition. "La transition écologique ne doit pas se faire au détriment des communes, des régions les plus enclavées", a plaidé le chef de l'État, expliquant aussi vouloir éviter que les travaux de la convention ne "s'abîment dans une polémique".

Le troisième refus du président concerne la modification du préambule de la Constitution, qui devait placer l'environnement au-dessus des autres valeurs fondamentales. "Telle que proposée la rédaction menace de placer la protection de l'environnement au-dessus des libertés publiques, au-dessus même de nos règles démocratiques. Je ne souhaite pas reprendre cette proposition, elle serait contraire à notre texte constitutionnel", a-t-il expliqué. 

En revanche, il s'est dit favorable à une réécriture de l'article premier la Constitution pour y introduire les notions de biodiversité, d'environnement et de lutte contre le changement climatique, comme l'a proposé la convention citoyenne pour le climat.

En ce qui concerne la création d'un crime d'"écocide", Emmanuel Macron s'est également montré prudent. Il renvoie au droit international mais promet de porter le combat au nom de la France au sein des instances multilatérales. L'introduction dans le droit français sera étudié.

Des référendums dès 2021 

En revanche, Emmanuel Macron a approuvé  le principe d'un moratoire sur les nouvelles zones commerciales dans la périphérie des villes ainsi que celui de mesures d'aides pour la rénovation des bâtiments. "Arrêter la bétonisation, c'est un projet pour rendre notre pays plus humain, au fond plus beau" et pour retrouver des commerces de centre-ville et mettre fin à un étalement des logements, a-t-il insisté, "c'est un modèle dont nos concitoyens veulent sortir".

Le président s'est par ailleurs dit "prêt" des référendums dès 2021 certaines propositions de la Convention citoyenne pour le climat, d'une part pour modifier la constitution, d'autre part pour des mesures spécifiques. En attendant, les 150 citoyens seront reçus par Richard Ferrand, président de l'Assemblée nationale, dès la semaine prochaine, a-t-il fait savoir, et un rendez-vous mensuel sera organisé chaque mois avec le gouvernement. "La démocratie délibérative ne doit pas s'arrêter à la porte des ministères ou des Assemblées", a estimé Emmanuel Macron. 

Emmanuel Macron a également souhaité la création de nouvelles conventions citoyennes, "sur d'autres sujets" que le climat, et annoncé la prochaine transformation du Conseil économique social et environnemental (Cese) en "chambre des conventions citoyennes". "Vous avez montré qu'il était possible sur un sujet difficile, inflammable même, de créer du consensus" a-t-il dit devant les membres de la Convention pour le climat, ajoutant qu'une réforme du Cese, assemblée composée de représentants sociaux, "sera présentée au prochain Conseil des ministres, qui en fera la Chambre des conventions citoyennes".