« C’est avec une grande émotion que je mets un terme à ma carrière. J’ai beaucoup travaillé, énormément reçu, c’était une aventure incroyable ! Même dans mes rêves les plus fous, je n’aurais jamais pensé vivre ces moments exceptionnels en équipe de France et en NBA », a annoncé le meneur de jeu de 37 ans sur son compte Twitter juste après avoir annoncé sa décision dans une interview avec le site internet sportif The Undefeated. Tony Parker, qui a annoncé sa retraite lundi après 18 saisons en NBA, est le meilleur joueur de l’histoire du basket français, l’homme qui l’a porté à des niveaux inconnus avant lui, autant sur la scène internationale que dans la grande ligue américaine
 
Deux dates-clefs disent tout de son importance. La première est 2003, lorsqu’il fut le premier Français à passer à son doigt la fameuse bague de champion de la NBA, le trophée le plus convoité dans son sport, avec les San Antonio Spurs. Trois autres allaient suivre (2005, 2007, 2014), ainsi qu’un titre de MVP (meilleur joueur) de la finale en 2007 et six sélections pour le « All Star Game ». L’autre est 2013, quand les Bleus gagnèrent leur première grande compétition internationale, l’Euro. C’était la récompense d’une fidélité exemplaire au maillot tricolore pour lequel il n’a cessé de clamer son amour.
 
Formé à l’Insep, où il a rencontré son grand ami Boris Diaw, retraité depuis l’an dernier, Parker a toujours dit qu’il voulait « rendre au basket français ce qu’il lui avait donné ». Sa réussite se lit aussi dans l’explosion du nombre de licenciés de la FFBB, la fédération française (+50 % en dix ans pour dépasser les 668 000 en 2018). Cette volonté de rendre au pays dans lequel il a grandi est aussi celle qui guide son engagement dans le club de Villeurbanne, racheté en 2014 avec l’ambition d’en faire un grand d’Europe. Né en 1982 à Bruges, en Belgique, d’un basketteur américain et d’une Néerlandaise, « TP » (tipi) est arrivé nourrisson à Denain, dans le Nord. Il a passé son enfance près de Rouen et opté pour la nationalité française à l’âge de quinze ans.

Un bourreau de travail

Son influence chez les Bleus a été énorme. Entre sa première sélection, en 2000, et sa dernière 16 ans plus tard en quarts de finale des Jeux de Rio, le génial meneur de jeu a conduit une douzaine de campagnes, enchaînant sans rechigner les JO et les Euros avec des saisons américaines exténuantes (plus d’une centaine de matches). Il compte 181 capes (pour 2 741 points, soit plus de 15 de moyenne par match) lors desquelles il a été à la fois le leader, l’inspirateur, l’organisateur et le finisseur de l’équipe. S’il n’était pas le tout premier Français en NBA à son arrivée au Texas, en 2001, à l’âge de 19 ans, c’est bien lui qui a servi de modèle aux nombreux compatriotes qui ont tenté l’aventure après lui. Ils sont dix cette saison dans le meilleur championnat de la planète. Et des dizaines d’autres rêvent d’y aller.

Sous la baguette de son mentor, l’entraîneur Gregg Popovich, Parker a joué un rôle déterminant, aux côtés de l’Argentin Manu Ginobili et de l’Américain Tim Duncan, dans la trajectoire des Spurs, devenus dans les années 2000 l’une des franchises marquantes de l’histoire de la NBA. Ce n’est que depuis deux ou trois ans que son impact avait diminué, le poussant un peu à contrecoeur à signer un dernier contrat avec Charlotte où il a joué ses ultimes matches. Il faut dire que sa plus grande qualité était de celles qui se perdent le plus avec l’âge, la vitesse. Il éblouissait par son exceptionnelle vélocité balle en main, ses démarrages fulgurants et ses slaloms funambulesques au milieu des défenses, souvent conclus par son fameux « teardrop » (larme en anglais), un tir en cloche indispensable à ce joueur d’1,88 m.

Toujours soucieux de progresser, Parker s’est ensuite amélioré dans la gestion du jeu, puis il s’est doté d’un tir plus fiable à longue distance avec l’aide d’un « shot doctor » (un conseiller spécial sur la technique de tir), au prix d’un travail de Romain : jamais moins de 200 tirs par jour. Vivant aux États-Unis, « TP » a évidemment un côté américain : sa mentalité de gagneur et son optimisme fondamental, mais aussi sa façon d’afficher sa réussite et son goût pour le marketing et le business, des traits de caractère qui ont suscité des critiques, malgré ses nombreux engagements en faveur des enfants pauvres ou malades.

Sportif et homme d’affaires

Homme d’affaires, Parker s’enorgueillissait de l’être avant même la fin de sa carrière. Il est devenu l’un des sportifs français les plus riches grâce à son salaire aux Spurs (12 millions de dollars par saison lors de ses grandes années) et à de nombreux contrats publicitaires. Il a ainsi pu faire de multiples investissements, le dernier en date dans la station de ski de Villard-de-Lans. C’est à ces activités économiques qu’il devrait désormais consacrer une grande partie de son temps, entre les États-Unis et la France, ainsi qu’à la présidence de l’Asvel, le club de Villeurbanne, qui fera ses débuts en Euroligue cet automne.
Chanteur de rap à ses heures perdues, acteur et producteur de cinéma, propriétaire à San Antonio d’une luxueuse villa dotée d’un terrain de basket couvert, d’un court de tennis, d’une salle de jeux vidéo… et d’une superbe cave à vin, Parker a aussi été un « people ». Son fastueux mariage au château de Vaux-le-Vicomte, puis son divorce au bout de deux ans avec l’actrice américaine Eva Longoria ont fait le bonheur des journaux. Il s’est remarié plus discrètement en 2014 avec une Française, Axelle Francine, et a fondé une famille de deux enfants qui « passe avant tout ».