Renversé! Détrôné! Roi incontesté de la Ligue des champions depuis trois ans, le Real Madrid a été guillotiné mardi à domicile par l'Ajax Amsterdam (4-1) en huitièmes retour, malgré un succès 2-1 à l'aller. Retentissante élimination des Madrilènes, condamnés à une saison blanche.
Au stade Santiago-Bernabeu, le roi est nu. Déchu de ses couronnes, de ses oripeaux de souverain du football européen, le club triple tenant du titre s'est incliné sur quatre buts splendides de Hakim Ziyech (7e), David Neres (18e), Dusan Tadic (62e) et Lasse Schöne (72e).
Et le but de l'espoir de Marco Asensio (70e) n'aura été que le dernier soubresaut d'un règne magnifique, avec quatre C1 en cinq ans, les trois dernières sous le mandat doré de Zinédine Zidane (2016-2018) et avec l'attaquant-vedette Cristiano Ronaldo, parti depuis à la Juventus.
En une semaine, le Real a tout perdu: Coupe, Liga, C1. Pour la première fois depuis 2010, la "Maison blanche" sera absente des quarts et il va falloir s'habituer à ne plus le voir régenter les soirées européennes.
Le régime madrilène aura tenu plus de 1000 jours, une éternité à l'échelle du football moderne qui fait de cette équipe la digne héritière du grand Real d'Alfredo Di Stéfano, vainqueur des cinq premières Coupes d'Europe.
- Les rois aussi sont mortels -
Mais les rois aussi sont mortels. Et l'Ajax, avec sa jeunesse et son jeu délié, a balayé ce monarque vieillissant, devenu moins redoutable avec les entraîneurs Julen Lopetegui (juin-octobre 2018) puis Santiago Solari (depuis octobre).
Dès la septième minute, une perte de balle que Toni Kroos n'aurait jamais commise du temps de sa splendeur a permis à l'Ajax de croire à l'exploit: l'intenable Tadic a débordé et servi en retrait Ziyech, buteur d'un tir croisé.
On n'entendait déjà plus que les milliers de supporters néerlandais massés dans les hauteurs du Bernabeu. Et les chants ont repris de plus belle quand Tadic, après une incroyable roulette, a servi Neres pour le deuxième but (18e).
Le Real a pourtant eu des occasions mais le poussif Kroos a tout gâché (12e, 16e). Et le défenseur français Raphaël Varane, l'un des rares à exhorter ses partenaires à se révolter en l'absence du capitaine Sergio Ramos suspendu, a trouvé la transversale (5e).
Et dire que Ramos avait délibérément obtenu un carton jaune à l'aller pour forcer une suspension, pensant la qualification acquise...
Mardi, rien n'a été épargné au Real: Solari ayant décidé d'un premier remplacement tactique à la 29e minute avec l'entrée de Gareth Bale, le technicien argentin a dû se mordre les doigts deux minutes plus tard quand le jeune Brésilien Vinicius s'est blessé (31e). Perdant son meilleur dribbleur, il a lancé Asensio (34e).
- La hache du bourreau -
Comme souvent cette saison, le Real a frappé au but (23e, 31e, 49e, 59e), à l'image de Bale qui a trouvé le poteau à angle fermé (42e). Mais comme souvent depuis le départ de Ronaldo, l'efficacité n'était plus là.
Et l'Ajax a multiplié les banderilles jusqu'à cette frappe limpide de Tadic, qui a fendu l'air comme la hache d'un bourreau pour se ficher dans la lucarne (62e). Il a certes fallu recourir à l'arbitrage vidéo (VAR) pour savoir si le ballon était sorti ou pas auparavant, mais l'arbitre l'a finalement validé.
Il fallait désormais trois buts en 30 minutes pour que le Real ajoute un nouvel exploit à sa longue légende européenne (13 titres en C1). Le premier est arrivé via Asensio (70e), pas les autres, et Schöne a achevé la mise à mort d'un coup franc lobé dans la lucarne.
Et puis enfin, la débandade: le Bernabeu qui se vide avant la fin du match, les supporters néerlandais qui ponctuent chaque passe d'un "Olé" goguenard, Benzema qui glisse seul face au gardien et des cris de "Florentino démission" qui visent le président merengue Florentino Pérez, coupable aux yeux des "socios" de n'avoir pas assez renouvelé l'effectif. Quant à Solari, sous contrat jusqu'en 2021, il risque d'être un fusible tout désigné...
C'est une révolte ? Non, c'est une révolution. Et le Real va vivre une fin de saison fade qui lui laissera du temps, beaucoup de temps, pour réfléchir à la reconquête.