Après s'être longtemps opposées aux paris sportifs, les grandes ligues américaines comme la NBA et la NFL se battent désormais pour en tirer le maximum de revenus, en espérant qu'ils permettront d'élargir leur public.
Depuis la légalisation il y a un an des paris sportifs dans plusieurs Etats américains, les Etats-Unis s'éveillent à la culture des paris sportifs légaux à grande échelle, quand l'Europe y est habituée depuis des décennies.
En mai 2018, la Cour suprême des Etats-Unis a levé l'interdiction qui pesait depuis 25 ans sur les paris sportifs dans la presque totalité du pays, à l'exception notable de Las Vegas et du Nevada.
Sept Etats de plus prennent désormais les paris et plusieurs autres vont s'y mettre dans les mois qui viennent.
Les championnats de basket (NBA), de football américain (NFL) ou de hockey (NHL) avaient espéré que se mettrait en place une structure qui leur ferait bénéficier automatiquement d'une partie des revenus générés par les paris, qui les aiderait à préserver l'intégrité de leurs sports.
Faute de loi fédérale, chaque Etat adopte progressivement sa propre législation et, à ce jour, aucune d'entre elles ne prévoit d'obliger les opérateurs de paris à reverser une partie de leurs revenus aux grandes ligues sportives.
Faute d'obtenir ce prélèvement, les ligues, qui sont toutes des entreprises privées, ont proposé que les Etats obligent les opérateurs à leur acheter leurs données officielles, résultats et statistiques des matches et tournois.
Chou blanc là encore, car seul le Tennessee a suivi.
Sous la menace de ne rien recevoir de la manne qui s'annonce, avec 3 milliards de dollars déjà joués hors du Nevada depuis un an, les grands championnats sont allés négocier directement la vente de leurs résultats et statistiques avec des opérateurs de paris.
"Les données officielles sont un produit marchand et nous estimons devoir être rémunérés par ceux qui les utilisent", a expliqué à l'AFP Scott Kaufman-Ross, vice-président de la NBA en charge des jeux d'argent.
Seule la NFL traîne encore des pieds, même si elle a accueilli, en janvier, le casinotier Caesars Entertainment parmi ses sponsors, une façon de rappeler à son public que les paris sont ouverts.
Elle a aussi une participation minoritaire dans l'un des grands fournisseurs de données du marché, Sportradar, qui lui a signé, depuis un an, des partenariats avec la NBA et la MLB.
- "Attirer l'audience" -
Même s'il n'en tire pas autant de revenus directs qu'espéré, le sport professionnel américain devrait profiter indirectement de l'intérêt suscité par les paris.
"Les gens qui parient sur le sport consomment plus de contenu, ils regardent davantage de matches et plus longtemps", a souligné Scott Kaufman-Ross, lors d'une table ronde à New York de la conférence Leaders, consacrée à l'industrie du sport.
Selon une étude de l'Association américaine des jeux d'argent (AGA), l'intérêt supplémentaire généré par les paris devrait rapporter 4,2 milliards de dollars par an aux quatre principales ligues sportives américaines (NBA, NFL, NHL et MLB).
"Quand nous aurons les chiffres d'audiences pour les Etats qui ont légalisé les paris, je ne serais pas surpris qu'ils soient beaucoup plus élevés" que l'an dernier, anticipe John Holden, professeur de management à l'université d'Oklahoma State.
"Quand viendra le moment de renégocier les droits télés", dit-il, "c'est là qu'ils vont vraiment voir la différence."
"Il y a tellement de contenu disponible aujourd'hui que vous devez trouver un moyen d'attirer l'audience", a indiqué Nakisa Bidarian, PDG de la société d'investissement Fertitta Capital, à la conférence Leaders.
"Le marché américain est très orienté sur les statistiques", explique Scott Kaufman-Ross. "Il y a aussi une grosse culture de la +fantasy league+", ces championnats virtuels dont les résultats dépendent des véritables performances des joueurs professionnels.
Les amateurs de NBA s'intéressent à bien d'autres choses qu'au score, rappelle-t-il, notamment aux statistiques individuelles.
La NBA croit particulièrement au développement des paris durant les matches, une pratique en pleine expansion qui dépasse maintenant les traditionnelles mises effectuées avant le début des rencontres.
Scott Kaufman-Ross prévoit le développement, dans les années à venir, d'applications très faciles d'utilisation, y compris pour les joueurs occasionnels, et de produits "beaucoup plus intuitifs".
L'enjeu n'est plus seulement de capter l'audience, mais aussi la conserver, explique Nakisa Bidarian, "parce que le temps d'attention se raccourcit et la quantité de données consommées augmente."