Longtemps stigmatisé pour sa cohorte de "mercenaires" sud-africains, Montpellier mise désormais sur sa jeunesse, l'un des moteurs de sa folle remontée dans la course à la phase finale du Top 14 qu'il tentera d'accrocher samedi à l'occasion de son déplacement à Clermont.
L'image du MHR est rafraîchie et le renversement de tendance symbolique de la bascule de sa politique sportive, entre le Sud-Africain Jake White et Néo-Zélandais Vern Cotter, intronisé à l'été 2017.
Dimanche, devant le Stade Français (42-25) dans un virtuel 16e de finale, le jeune pilier remplaçant Mohamed Haouas a révélé aux yeux du Top 14 la mutation du club héraultais, qui se réhabilite au bout d'une saison tout en contraste.
Au bout d'une chevauchée de trente mètres, le fougueux pilier, âgé de 24 ans, a ainsi arraché après le sirène le bonus offensif pour replacer Montpellier dans le wagon des six qualifiés.
"C'est tout un symbole que ce soit +Momo+ qui marque", plaide Benoît Paillaugue, cadre expérimenté du MHR. "Il est issu du centre de formation, n'a connu que ce club et joue depuis deux ans avec nous. Dans ce groupe, fait de très jeunes joueurs et d'anciens, un truc se crée."
"Cela fait des mois, et des années, que l'on a la chance à Montpellier d'avoir un très bon centre de formation et de très bons jeunes", ajoute le demi de mêlée.
- Ngandebe préféré à Nagusa -
Trois des six essais marqués contre Paris l'ont été par des jeunes, puisque le centre Yvan Reilhac (23 ans) et l'arrière Henry Immelman (24 ans le 26 mai) avaient précédé Haouas. Tous bénéficient de la confiance de Cotter.
"Ils sont là car ils font de bons matches et se mettent au service de l'équipe. A l'image de Reilhac, ils font le maximum pour que cela se passe bien. On est contents de l'apport de ces jeunes", sourit le Néo-Zélandais.
Outre ces trois-là, Yannick Arroyo, Martin Devergie, Enzo Sanga ou Arthur Vincent, champion du monde des moins de 20 ans, et surtout l'ailier Gabriel Ngandebe, préféré à Timoci Nagusa, prennent de plus en plus de place depuis l'amorce de la "remontada", au creux de l'hiver.
Ailier de 22 ans arrivé de Massy en 2017, Ngandebe symbolise le travail patient de Cotter, qui plonge dans le bain les jeunes, les laisse patauger pour leur permettre de mûrir avant de leur accorder une confiance durable.
- "Pousser les vieux" -
L'inverse de White qui, pendant plus de deux ans et demi (décembre 2014-2017), avait misé sur le recrutement de Sud-Africains et sacrifié le centre de formation du MHR, précédé d'une flatteuse réputation depuis l'émergence des "Quatre fantastiques", Fulgence Ouedraogo, Julien Tomas, François Trinh-Duc et Louis Picamoles.
Il y eut plus tard l'éclosion de Geoffrey Doumayrou (La Rochelle) ou du 3e ligne Kélian Galletier.
"Même si j'ai débuté sous ses ordres, c'est vrai que Jake White ne faisait pas confiance aux jeunes", raconte Reilhac qui éclabousse de son talent cette fin de saison.
"On a pris conscience de la confiance que nous accorde Cotter. Depuis qu'il est arrivé, il a dit qu'il comptait sur nous et voulait ainsi pousser les vieux. On a répondu présent et prouvé que ce n'était pas un risque de nous faire jouer", ajoute-t-il.
Immelman, Reilhac et Ngandebe se libèrent dans cette fin de saison, renouvellent une ligne de trois-quarts moins dépendante de Nemani Nadolo et équilibrent l'équipe, dont la force était jusque-là concentrée sur la seule puissance de ses avants.
"Il y a une petite bascule qui s'est opérée, on l'a senti devant le Stade Français. On a maintenant une équipe qui est capable de jouer plusieurs formes de jeu et qui veut aller le plus loin possible" apprécie Cotter. Lequel prendra la saison prochaine du recul sur l'équipe première (directeur du rugby du club), à l'heure où il finit par imposer ses idées et son projet de jeu.