L'ex-sélectionneur du XV de France assure vouloir mener "le combat" de sa vie. Guy Novès va réclamer jeudi devant le conseil des prud'hommes de Toulouse 2,9 millions d'euros à la Fédération française de rugby (FFR) pour "laver son honneur".
Novès, 65 ans, était arrivé à la tête des Bleus en 2016. Mais 21 matches plus tard (7 victoires, 13 défaites, 1 nul), fin décembre 2017, il a été débarqué par le président de la FFR, Bernard Laporte.
Pour justifier le limogeage de celui qui possède le plus grand palmarès d'entraîneur de France avec 4 couronnes européennes et 10 boucliers de Brennus à la tête du Stade Toulousain, Bernard Laporte a fait valoir une "faute grave". Il a fait état d'un audit effectué auprès des clubs, des joueurs et des dirigeants qu'il n'a pas produit.
Devant la justice à Toulouse, Novès est décidé à se battre. Il veut pour commencer faire reconnaître l'illégalité de la décision, car il affirme en avoir pris connaissance dans la presse et pas selon les règles de droit, à savoir dans une lettre puis lors d'un entretien préalable au licenciement pendant lequel il aurait pu s'expliquer.
"Faute grave ?"
Ce non respect du droit a d'ailleurs été reproché à Bernard Laporte par ses opposants: "Il n'y a pas un chef d'entreprise qui licencie quelqu'un en annonçant son départ dans la presse", a déploré le président de la Ligue régionale d'Ile-de-France, Florian Grill.
En même temps que la conformité du licenciement, une première dans l'histoire d'un sélectionneur des Bleus en cours de mandat, c'est sa motivation que Novès veut aussi contester.
"Quelle faute grave ?" a-t-il déjà demandé après l'audience de conciliation des prud'hommes en mai, avant de reprocher à la FFR de "ne pas l'avoir laissé finir son travail". Et d'affirmer avec force vouloir "laver son honneur" car "pour moi, le plus important, c'est de retrouver le regard des gens"
Pour l'ex-sélectionneur, dont l'inimitié d'avec le président de la FFR était notoire, il pourrait s'agir aussi de faire admettre la préméditation et par conséquent le caractère vexatoire de son éviction. Certes, son limogeage est intervenu après une série six test-matches sans succès, ponctuée d'une contre-performance historique face à la modeste équipe du Japon (23-23).
Mais M. Laporte n'avait-il pas fait part de son désir de l'évincer s'il était élu en 2016 ?
"A Toulouse, il était Dieu"
Au total, avec son avocat Me Laurent Nougarolis, Guy Novès a prévu 21 points différents pour justifier les quelque "2,9 millions d'euros" qu'il veut demander en réparation: rupture du contrat de travail, harcèlement, perte des annuités de retraite, atteinte à l'image, règlement des heures supplémentaires (500.000 euros) ou repos compensateurs (200.000 euros).
Selon Me Joseph Aguerra, défenseur de la FFR, il se prévaut notamment d'heures passées à regarder la télévision. "Ça part dans tous les sens", a déploré Me Aguerra.
Me Aguerra a indiqué qu'il plaidera en "l'absence de Bernard Laporte" mais en présence d'une "personnalité surprise" pour une "requalification du contrat de CDD" dont bénéficiait Novès, "en CDI".
Pour la FFR, dans un contexte économique difficile avec un déficit de 7,35 M€ pour l'exercice 2017-2018, cette modification contractuelle réduirait le coût de l'indemnisation.
Elle passerait sous le barème de la loi Macron (2 à 3 mois) et ne courrait plus jusqu'au terme du contrat (24 mois) a priori prévu à la fin de la Coupe du monde (20 septembre-2 novembre).
Quant à la faute grave, elle est constituée par "son mode managérial", estime-t-on dans l'entourage de la FFR.
"A Toulouse, il était Dieu. Il choisissait même le gardien du stade. Il est arrivé à la FFR et il n'a pas changé alors qu'il y avait des gens qui voulaient faire des choses. Il n'a pas su évoluer. Il a voulu faire comme à Toulouse", avance-t-on de même source.